Sans compromettre la qualité des vins, plusieurs leviers techniques permettent aujourd’hui d’optimiser les coûts au vignoble. Évaluation parcellaire, choix de la taille, entretien du sol ou mutualisation : tour d’horizon des pratiques les plus efficaces issues du Guide des Vignobles Rhône-Méditerranée.

 

Évaluer la rentabilité de chaque parcelle

Avant toute décision, il est essentiel de dresser un bilan économique précis de chaque parcelle :

  • Caractériser son niveau de production (quantité récoltée) et sa régularité ;
  • Estimer la valorisation moyenne (chiffre d’affaires sur les 2 ou 3 dernières années) ;
  • Déterminer son coût d’entretien et identifier les postes de dépenses les plus lourds (taille, vendange, entretien du sol…).

Cette approche permet de distinguer les parcelles les plus rentables de celles qui ne couvrent plus leurs charges. L’objectif : réallouer les moyens de production là où ils créent le plus de valeur.

Un des 1ers levers à activer est de prioriser l’arrachage des parcelles devenues non rentables.

 

Après l’arrachage, quel devenir pour ces parcelles ?

La première question à se poser après un arrachage est celle du devenir de cette parcelle : diversification, replantation rapide ou repos du sol ?
Un repos du sol reste souvent bénéfique avant toute replantation. Cependant, aucune économie immédiate n’est à attendre lors de la création d’une nouvelle vigne : plants, tuteurs, piquets, main-d’œuvre… l’investissement est important, mais il conditionne parfois la pérennité de l’exploitation.

Avant la plantation, une analyse de sol complète (structure, calcaire actif, compaction) est indispensable. Elle guide le choix du porte-greffe et du cépage, tout en optimisant les apports de fond.
Une plantation adaptée à la parcelle limite ensuite les interventions de désherbage, de palissage et d’entretien.

 

Une fertilisation à arbitrer

La fertilisation est souvent le premier poste où l’on tente de réduire les dépenses.
Mais attention aux impasses répétées, qui fragilisent le vignoble.
L’enjeu est d’ajuster les apports en fonction des analyses de sol et de feuille, sans excès ni sous-dosage.
Sur des vignes à viveurs normales ou forte, un entretien azoté tous les 3 ans peut être suffisant. Un entretien régulier en potasse et magnésie est également utile.

 

Palissage

Le palissage représente un coût conséquent, à l’installation et annuellement lors des travaux en vert. Le raisonner par rapport au port des cépages est indispensable à l’installation.
Pour les vignes palissées, il est utile de comparer les différents matériaux selon leur durée de vie et leur prix.

Matériaux Avantages Inconvénients
Piquets bois Peu coûteux à l’achat Remplacement fréquent
Piquets galvanisés Longévité importante Prix plus élevé
Piquets composites Résistants et légers Coût variable selon les années

Un palissage durable garantit une meilleure tenue du feuillage et une réduction des interventions au fil du temps.

 

Taille

La taille est un poste majeur, représentant jusqu’à 20 % des charges totales. Les écarts de coûts selon les systèmes de conduite sont significatifs.

 

Comparaison des coûts selon le mode de conduite

Exemple de conduite Opérations principales Prix total à l’hectare
Gobelet Pré-taille + taille + broyage des sarments 1 000 €
Cordon de Royat palissé Pré-taille + taille + tirage + broyage 1 200 €
Guyot palissé Pré-taille + taille + attachage + tirage + broyage 1 400 €
Taille mécanique de précision Taille mécanique avec repasse 500 €

Économies potentielles à l’hectare

Mode de taille Coût annuel d’entretien Économie (ha) Économie
Taille mécanique de précision – 1 fil 460 € 1 025 € 70 %
Taille mécanique de précision – 3 fils 640 € 845 € 57 %
Taille minimale 60 € 1 425 € 95 %
Taille Guyot 1 485 €

La taille mécanique de précision permet jusqu’à 1 400 € d’économie par hectare, tout en assurant une qualité homogène.
Le choix dépend du cépage, de la vigueur du sol et du matériel disponible.

 

Remplacements

Le remplacement des ceps morts doit être soigneusement réfléchi. L’opération reste coûteuse et rarement rentable à court terme. Il est conseillé de la réserver aux jeunes vignes (5 à 10 ans) et aux parcelles à forte valeur ajoutée, ou d’attendre une replantation complète.
La qualité du plant et la compatibilité greffe/porte-greffe sont déterminantes.

 

Entretien du sol

L’entretien du sol doit allier efficacité agronomique et maîtrise des coûts :

  • Stratégie mixte : alternance entre passages d’herbicide et travail mécanique.
  • Travail du sol exclusif : bon contrôle des adventices, mais plus de main-d’œuvre.
  • Alternance rangs enherbés / rangs travaillés : bon compromis entre structure du sol et économie de carburant.

Le broyage des rangs enherbés est plus économique que le travail du sol intégral.

 

Stratégie phytosanitaire

Les économies sur la protection phytosanitaire sont limitées et dépendent du climat.
L’enjeu n’est pas de réduire le nombre de traitements, mais de les adapter à la pression réelle des maladies.
L’observation, les outils d’aide à la décision et le suivi météo local permettent de raisonner les interventions sans compromettre la qualité sanitaire.

 

Mutualiser le matériel

La mutualisation du matériel via les CUMA ou entre voisins est un levier efficace pour réduire les charges fixes.
Elle permet d’amortir les investissements lourds (taille mécanique, pulvérisateur, broyeur) et d’assurer une meilleure utilisation du matériel tout au long de l’année.

 

Luc Gleize, viticulteur à Ste Cécile les Vignes (84) : « J’exploite environ 50 ha de vignes dont 20 % sont en taille rase. Je produis des IGP, Côtes-du-Rhône, Côtes-du-Rhône Villages et Cru Vinsobres. Je pratique la taille rase depuis 2013. Les rendements sont légèrement supérieurs à la taille claque mais surtout, ils sont plus réguliers et moins sensibles au gel. J’ai acheté ma machine actuelle en 2019 pour une valeur de 21 500 €, cela comprend le mat porte-outil, la prétailleuse et la tailleuse avec suivi de cordon. Je compte entre 10 et 15 heures de taille par hectare. Les autres leviers pour limiter les coûts de production sont le suivi au vignoble par un technicien de la Chambre d’agriculture et de faire jouer la concurrence entre les fournisseurs de produits phyto ».

Rémi VANDAMME

Conseiller viticole

Pôle technique Vigne et Vin